22 Bayard à Paris (75)

Parti architectural

Après le départ de RTL, le 22 rue Bayard a dû se réinventer. C’est chose faite grâce à l’agence d’architecture d’Axel Schoenert qui a intégré les deux immeubles voisins. Soit, aujourd’hui, un nouvel ensemble harmonieux, mêlant architecture contemporaine bas carbone et patrimoine parisien.

Photo : Simon Guesdon

Aujourd’hui basée à Neuilly-sur-Seine, Radio Télévision Luxembourg, plus connue sous l’acronyme RTL, a grandi durant quatre-vingt ans au numéro 22 de la rue Bayard, dans le huitième arrondissement parisien. Installée là depuis 1936, elle la quitte en 2018, suite à son rachat par le groupe M6, pour se rapprocher du siège de son nouveau propriétaire. Le bâtiment, une fois vidé, et deux immeubles voisins – formant un ensemble intriqué et d’époques différentes – ont alors fait l’objet d’une lourde opération de restructuration pour accueillir des bureaux. Un programme mené par l’agence d’architecture fondée par Axel Schoenert et Zsofia Varnagy, pour le compte de LaSalle Investment Management & Nexity. Si les deux édifices posthaussmanniens, situés rue Bayard et impasse d’Antin, ont été conservés, le bâtiment abritant à l’origine la radio a été, en revanche, démoli pour laisser place à une construction neuve en structure bois « bas carbone ». En effet, datant des années 1970, l’adresse historique de RTL présentait surtout des locaux aveugles dédiés aux studios d’enregistrement et s’avérait donc inadaptée pour sa nouvelle destination. Bien connue des Parisiens, la façade aveugle de la rue Bayard accueillait une œuvre de l’artiste Victor Vasarely réalisée en collaboration avec son fils Yvaral. Soit des lames métalliques peintes d’un motif évoquant les ondes radiophoniques,

qui habillaient l’intégralité de la façade. Celle-ci a été démontée avant la démolition de l’immeuble et confiée à la fondation Vasarely. Ainsi, de deux ensembles distincts, le projet aboutit à la réalisation d’un seul et même bâtiment de 8 200 m2 de bureaux. « Cette opération, qui allie construction neuve et rénovation lourde, répond à plusieurs enjeux : maximiser les hauteurs sous plafond, respecter l’altimétrie imposée par les bâtiments voisins, réaliser les planchers les plus fins possibles et éviter les retombées de poutres », explique l’architecte Axel Schoenert, en charge du projet.

Plan R+2 Doc : Axel Schoenert Architectes

Coupe longitudinale Doc : Axel Schoenert Architectes

Une façade signal

Pour donner une nouvelle identité à l’ensemble bâti, une façade métallique composée de panneaux de bardage en laiton perforé, aux reflets mordorés, est juxtaposée aux deux façades historiques rénovées, créant ainsi un heureux contraste de matériaux. À la manière des portes cochères parisiennes, de larges volets en laiton donnent accès à la construction. Derrière cet écrin, le bâtiment neuf arbore une structure mixte bois-métal. En matière de gabarit, la construction neuve s’aligne sur les mitoyens de la rue Bayard et culmine à 25 m en R + 7, au centre de la parcelle. Par un jeu de toitures terrasses accessibles aux usagers, le gabarit de la construction diminue vers l’impasse d’Antin pour terminer en R + 2. Un patio en R-1 permet d’apporter la lumière naturelle aux locaux en sous-sol. Lumière qui est d’ailleurs le fil rouge du projet, puisqu’indispensable au confort des usagers de ces espaces de travail. Pour en maximiser les apports, transparences et percées visuelles ont été privilégiées. Ainsi, les bureaux, à l’ambiance feutrée et élégante, sont clairs, hauts sous plafond, spacieux et systématiquement en premier jour. Au total, ils peuvent accueillir plus de 700 personnes et profitent de 1 000 m2 de services et d’espaces communs qualitatifs en rez-de-jardin, avec notamment un restaurant contemporain, un espace wellness (bien-être, en français), un auditorium, des salles agiles pour organiser des réunions et un lobby avec conciergerie.

Photo : Simon Guesdon

 

La nature au bureau

Autre composante essentielle de l’architecture du 22 Bayard, la végétation très présente et accessible – on compte 740 m2 d’espaces extérieurs. Sur les multiples toitures, des terrasses végétalisées sont aménagées, participant ainsi au bien-être des usagers. Sur les cours, deux patios, également végétalisés, laissent pénétrer la lumière naturelle au niveau rez-de-jardin. Et au dernier étage, un rooftop offre une vue imprenable sur Paris et ses monuments. En outre, il accueille des plantes comestibles. Une réussite pour cette opération qui vise un haut niveau de certification. Elle a déjà obtenu les certifications HQE Excellent et Wired Score Gold et est en cours de demande pour Breeam Very Good, Well Gold et BBCA.

Entrée rue Bayard Photo : Simon Guesdon

Intervenants

Maîtrise d’œuvre de conception : Axel Schoenert Architectes (75)

Maîtrise d’œuvre d’exécution (MOex) : AIA Management

BET structure et façade : AIA Ingénierie (75)

Charpentier bois : Barcque Charpentes (91)

BET fluides : CC Ingénierie

BET acoustique : Impact Acoustic

Programme

Restructuration complète et construction neuve : immeuble de bureaux avec salle de sport, vestiaire, auditorium, espace de restauration

Propriétaire du bâtiment : CNP Assurances, La Française REM (Asset Manager)

Maîtrise d’ouvrage : LaSalle Investment Management (75), Nexity (75)

Coût travaux : 26 M € HT Surfaces : 8 200 m2 de bureaux innovants et 740 m2 de jardins et terrasses

Calendrier

Livraison : décembre 2021

Durée du chantier : 32 mois

Une succession de terrasses Photo : Simon Guesdon

Étude et conception

Cette structure « très » mixte a été conçue avec AIA Ingénierie, un trio d’ingénieurs structure qui a réalisé les études d’exécution.

Photo : Axel Dahl

Le bâtiment érigé à la place de l’ancien siège de RTL est constitué d’une structure poteaux-poutres mixte bois-béton-métal, qui repose sur deux niveaux de sous-sol. Celle-ci profite des qualités spécifiques de chaque matériau et les utilise selon le principe du « bon matériau au bon endroit ». Les études d’exécution ont été réalisées par Pierre André Bonnet de chez Arpente pour la partie bois, par Louis Savigny de chez Ingé-St-Ar pour la partie métal, et par Gaël Renaud de chez Scyna4 pour la partie béton. Les éléments porteurs verticaux comprennent des poteaux BLC aux sections généreuses (de 360 x 360 à 480 x 480) et des voiles et noyaux béton qui accueillent les circulations verticales. En plancher, des panneaux de CLT de 200 et 260 mm d’épaisseur sont repris par un réseau de poutres PRS (poutres métalliques soudées). Celles-ci disposent d’une âme basse qui sert de corbeau pour porter les panneaux de CLT en rive. Des cales bois permettent de compenser les variations d’épaisseur des CLT. Ponctuellement, les panneaux peuvent être repris par des UPN et des engravures dans les voiles BA, aux extrémités de la construction. Les panneaux de CLT sont couturés entre eux à l’aide d’un couvre-joint bois et de vis, ou encore fixés bord à bord avec des vis. Les interfaces entre structures horizontales et verticales sont assurées par des ferrures métalliques complexes. Ces nœuds reprennent les poutres par boulonnage et les poteaux bois à l’aide de ferrures en âme et de tiges inox. Les toitures terrasses sont réalisées pour leur part en béton armé, permettant ainsi de profiter d’une pente nulle pour l’étanchéité.

Axonométrie de la structure Doc. : Arpente & Barcque Charpentes

Coupe de détails Doc. : Axel Schoenert architectes

Réalisation

C’est l’entreprise Barcque Charpentes qui a géré le lot charpente bois. Elle a travaillé main dans la main avec KS Construction, responsable du gros œuvre, et Ingé-pose qui avait en charge la charpente métallique.

 Photos : Axel Dahl

Ce chantier, implanté sur une parcelle très contrainte en plein Paris, a exigé une organisation fine et précise. Il a fallu avant tout curer une partie de la parcelle en confortant les avoisinants, puis créer deux niveaux de sous-sol. Ce qui a nécessité de lourds travaux de reprise en sous-œuvre grâce à des voiles par passe et des puits blindés. Au droit des rues, des écrans de soutènement béton ont été construits. Quant aux bâtiments existants, leurs fondations ont été prolongées tandis que des points complémentaires ont été créés. Les superstructures conservées ont été fortement remaniées et les circulations verticales démolies. Seul un escalier à forte valeur patrimoniale a été préservé. La création de nouveaux noyaux a permis de contreventer la nouvelle structure mixte bois-métal. Les panneaux de CLT ont été précisément découpés dans l’usine du fabricant autrichien KLH, distribué en France par la société Lignatec. À noter, ces derniers présentent la meilleure qualité de surface : Habitat (WSI). Livrés directement sur chantier par semi-remorque, ils ont été mis en place par grutage. Et ce, dès leur arrivée, le chantier n’offrant quasiment aucune zone de stockage. Les poteaux en BLC ont également été fournis par Lignatec. Ils ont été livrés au fil de l’eau, à l’atelier de Barcque Charpentes, à Chilly-Mazarin (91). Ce dernier a également géré la reprise des charpentes bois des constructions existantes.

Le cahier a été réalisé par Bastien Lechevalier, architecte DPLG.

Charpente conservée Photos : Axel Dahl

Façade en cours de pose Photos : Axel Dahl

Toiture béton Photos : Axel Dahl

Une charpente mixte Photos : Axel Dahl

​Volume de bois

600 m3 d’épicéa autrichien

2 350 m2 de plancher CLT (Lignatec KLH)

Logistique & Délais

Temps passé : 3 557 heures

Matériel de levage utilisé sur le chantier : grue à tour

Livraison : 2021

Entreprise

DG : Fabien Barcque

Début de l’histoire : 1995

Chargé d’affaires : Fabien Barcque

Maîtrise d’ouvrage 

Lasalle Investment

Management & Nexity

Maîtrise d’œuvre

Axel Schoenert Architectes (75)

BET structure

AIA Ingenierie (75)

BET EXE structure

Arpente (75),

Scyna4(94),

Ingé-St-Ar (75)

Charpentier bois

Barcque Charpentes (91)

Cet article est extrait de Wood Surfer n°131 > Découvrir le numéro en intégralité <