Collège Niki-de-Saint-Phalle à Nancy (54)

Parti architectural

Le collège Niki-de-Saint-Phalle à Nancy est le premier établissement Bepos de la région Grand-Est. Cette construction à structure bois/paille est l’œuvre de l’agence parisienne MU Architecture.

Photo : 11h45

Le campus Artem est situé à Nancy, rue du Sergent-Blandan. À sa création, dessiné par ANMA, il rassemble « sous un même toit » des écoles d’enseignement supérieur qui forment des créateurs, des ingénieurs et des managers. Ceux-ci viennent de Mines Nancy, de l’ICN Business School et de l’École nationale supérieure d’art et de design de Nancy. L’Institut Jean-Lamour, premier laboratoire de physique de France spécialisé en ingénierie des matériaux, les a rejoints depuis. Pour profiter de cette effervescence pédagogique, le conseil départemental de Meurthe-et-Moselle a décidé d’y installer son nouveau collège, du nom de Niki-de-Saint-Phalle en hommage à l’artiste éponyme. Cet établissement, né de la fusion de deux autres qui étaient vétustes, accueille notamment des enfants issus de familles défavorisées. Cette localisation unique au sein du campus Artem diversifie donc la population étudiante. Le projet de l’agence d’architecture parisienne MU, lauréate du concours de maîtrise d’œuvre, propose un bâtiment intégré à son environnement urbain, notamment celui du campus, à travers le règlement de la Zac rédigé par ANMA.

S’y déplacer les yeux fermés

Le plan de l’établissement est extrêmement simple pour permettre aux étudiants de s’orienter aisément. « La compréhension immédiate des espaces et de leur articulation est un principe fondateur du projet », précise Ludovic Malbet, architecte associé chez MU Architecture. Ainsi, depuis le hall d’entrée en triple hauteur, accédant au préau et à la cour, on dispose d’une visibilité directe sur les accès aux niveaux supérieurs où sont situées les salles de classe. Pour souligner ce lien, le traitement acoustique en bois massif des plafonds du rez-de-chaussée se retournent à la verticale comme une invitation à monter. « Les circulations sont, en outre, dilatées pour offrir non seulement plus de confort, mais aussi des surfaces libres d’occupation, ouvertes à tout type d’usage », ajoute Ludovic Malbet. La simplicité du plan des étages et la compacité du programme facilitent l’orientation des élèves, tout en assurant une certaine liberté dans l’évolution future de l’établissement. Celui-ci peut, en effet, voir ses besoins et ses effectifs fluctuer ultérieurement.

 Façade bardée de tôles microperforées.  Photo : 11h45
Le hall d’entrée. Photo : 11h45

Excellence environnementale

Le projet de MU vise l’excellence environnementale et en coche toutes les cases. Il a été conçu selon la démarche PassivHaus et est le premier collège Bepos de la région Grand-Est. Les matériaux biosourcés sont omniprésents dans la construction : structure bois, parement bois massif et isolation à l’aide de ballots de paille. Cette dernière, naturelle et renouvelable, est produite localement. La grande compacité du bâtiment a un rôle environnemental qui nous est détaillé par Jean-Philippe Dufreigne et Jérémie Vareilles, ingénieurs écoconception pour l’architecture chez Milieu Studio et qui ont accompagné MU pendant les études : « La conception bas carbone a trop tendance à être résumée au choix de matériaux vertueux, alors que le premier des prérequis est d’économiser de la matière. Cela se traduit avant tout par l’optimisation des formes et des volumes, avec, pour objectif, de simplifier l’enveloppe thermique du bâtiment. »

Coupe horizontale. Doc. : MU
Le centre de documentation et d’information. Photo : MU
Plan du rez-de-chaussée. Doc. : MU

Intervenants

Maître d’ouvrage : Département de Meurthe-et-Moselle (54)

Architectes : MU Architecture (75)

BET structure bois : Scop Gaujard Technologie (84)

BET structure : Anatech (37)

BET fluides et thermique : Louis Choulet (63)

Écoconception : Milieu Studio (69)

Paysagiste : Atelier Moabi (75)

Économie : VPEAS (75)

BET VRD : 3IA (10)

BET SSI : BSSI (75)

Programme 

Coût travaux : 7,9 M€ HT

Surface de planchers : 3 000 m2

Calendrier 

Livraison : septembre 2022

Durée du chantier : 18 mois

Low-tech

L’augmentation des températures et de la pluviométrie dans la région à l’horizon 2050 a été anticipée notamment par la métropole de Nancy qui impose, aujourd’hui, des règles spécifiques, en particulier, en ce qui concerne les eaux pluviales. Celles-ci doivent être infiltrées à 100 % sur les parcelles imposant la mise en place d’un stockage des eaux du fait de la faible perméabilité des sols. Les toitures végétalisées retardent leur arrivée tout en favorisant l’humidification de l’air de nos villes, trop sec. Dans un esprit low-tech et pour assurer le confort thermique de l’équipement sans recourir à la climatisation et au chauffage, une centrale adiabatique et des brasseurs d’air ont été installés. La forte épaisseur des murs, près de 60 cm, qui allient la paille à la laine de roche, et l’étanchéité à l’air parfaite demandée par le label PassivHaus permettent de limiter les besoins en énergie à 15 kWh/m2/an, contre 50 kWh/m2/an actuellement imposés par la réglementation. Une partie de cette énergie est apportée par le réseau urbain de chaleur.

Étude et conception

Précurseur et très actif dans le domaine du bois/paille, le bureau d’études structure Gaujard Technologie a accompagné l’agence d’architecture MU durant le projet.

Photo : 11h45

Le collège a été conçu avec une structure à poteau-poutre bois contreventée par les noyaux béton, seuls éléments en béton armé de la superstructure, lesquels accueillent les circulations verticales. La partie bois comprend des poteaux BL-C et des poutres BL-C 200/840 pour les files intermédiaires. En façade, les MOB avec montants en BL-C 60/360 portent les planchers en CLT. L’épaisseur de ces derniers varie avec les charges d’exploitation des pièces de 110 mm à 160 mm. Gaujard Technologie a participé à la mise en place des règles professionnelles de la construction paille et à son entrée dans les ERP. En 2014 déjà, le bureau d’études travaillait sur le sujet pour le groupe scolaire Louise-Michel à Issy-les-Moulineaux (voir Wood Surfer n° 80). La tenue au feu des MOB paille avait été validée par un essai Lepir II, réalisé au CSTB, pour un SF30, et avait profité par la suite à d’autres réalisations. En effet, la paille est un matériau inflammable, elle est donc fortement compactée afin de chasser l’air des bottes. Pour cette réalisation, en concertation avec le bureau de prévention des risques Alpes contrôles, il a été décidé de protéger les murs à l’aide de laine de roche posée en extérieur et en intérieur, et d’y ajouter un doublage en plaques de plâtre.

Axonométrie de la charpente bois.  Photo : 11h45
Axonométrie structure principal et parois verticales. Photo : 11h45
Axonometrie-charpente-bois. Photo : 11h45
Coupe-de-bois Photos : ©11h45

Réalisation

Le Bras Frères, société située à Jarny, en Meurthe-et-Moselle, a eu la charge du macrolot structure bois, façade et couverture. Elle est accompagnée par l’entreprise Univert’Foin, qui fournit la paille.

Photos : MU

L’entreprise Le Bras Frères est bien connue pour ses chantiers sur les monuments historiques. Elle participe notamment actuellement à la restauration de la charpente de Notre-Dame de Paris. Les études d’exécution du projet ont débuté en octobre 2020. Les nombreux échanges avec le bureau de contrôle notamment autour de l’intégration de la paille à la construction ont différé le démarrage de la pose à novembre 2020. L’ensemble de la charpente bois a été modélisé en 3D, puis fabriqué dans les ateliers de l’entreprise grâce à la commande numérique K2i. L’isolation par bottes de paille des MOB en BL-C est également réalisée sur place. Celles-ci ont été fournies par l’entreprise Univert’Foin qui produit les bottes aux dimensions demandées grâce à une « machine maison ». 

 Réalisation des planchers. Photos : MU
 Mise en place des bottes de paille. Photos : MU
 Charpente du hall. Photos : MU

La matière première est produite dans des champs situés à côté des ateliers, à Bouzonville (54). Le taux d’humidité du matériau est soigneusement contrôlé durant la récolte et le stockage. La pose est réalisée par Le Bras Frères qui a investi dans l’équipement requis et a fait suivre par dix de ses compagnons la formation « Pro-Paille ». Une fois prêts, les panneaux sont protégés contre les intempéries, puis livrés en flux tendu sur le chantier pour une pose immédiate à l’aide de la grue à tour. Quatre mois seulement ont été nécessaires pour poser l’ensemble de la charpente bois.

Le cahier a été réalisé par Bastien Lechevalier, architecte DPLG.

Logistique, coût et délai

Atelier : centre d’usinage Hundegger K2i

Matériel de levage utilisé sur le chantier : grue à tour, chariot télescopique, nacelle

Montant du macrolot structure bois, façade, et couverture :  3 M€ HT

Livraison : 2022

Cet article est extrait de WoodSurfer 130 disponible sur Calameo.