Le contreplaqué « made in France »

Avec l’arrivée de la troisième génération à la direction du Groupe Thébault, cette entreprise familiale spécialisée dans la fabrication de panneaux de contreplaqué passe une étape clé de son histoire et annonce ses ambitions pour les années à venir. Au programme notamment le renforcement de l’offre pour le marché de la construction avec le label Bois de France. Rencontre avec Antoine Thébault, président du groupe.

L’histoire commence en 1953, lorsque Jean Thébault, le grand-père du nouveau dirigeant de l’ETI familiale, décide de créer à Magné (79) une scierie dédiée à la transformation de peuplier, essence bien présente dans la région. Mais c’est avec l’okoumé, importé du Gabon, que sept ans plus tard a démarré l’industrie de panneaux de contreplaqué, l’activité qui a fait entrer l’entreprise dans la cour des grands. Au milieu des années 1980, l’offre s’élargit au pin maritime, puis, en 2018, au contreplaqué de peuplier avec la création, en partenariat avec l’entreprise Drouin, de la société Bois déroulés de Champagne (BDC) au cœur des forêts du Grand-Est. Aujourd’hui, le Groupe Thébault est le seul acteur-fabricant de l’industrie des panneaux de contreplaqué dans le monde à proposer une gamme en trois essences différentes. Et il revendique son côté patriote, car 100 % de ses produits sont assemblés en France. L’entreprise dispose de quatre sites de production dans l’Hexagone : Magné (79), Sauzé-Vaussais (79), Solférino (40) et Marigny-le-Châtel (10). Ingénieur BTP de formation, Antoine Thébault (43 ans) a rejoint l’entreprise familiale en 2016, après avoir travaillé pendant 14 ans dans le secteur des Travaux publics, au sein des groupes Eiffage et NGE.

Le Bazaar Saint-So à Lille, projet de Béal & Blanckaert Architectes (59), lauréat du Prix national construction bois 2021 dans la catégorie « Aménagement intérieur ou extérieur ». Polyvalent, le contreplaqué Tebopin a été utilisé dans cette réhabilitation en parois de séparation, revêtement mural, revêtement de plafond, plancher et mobilier.
Photo : Béal & Blanckaert Architectes
Antoine Thébault, président du Groupe Thébault : « Malgré une opération de transmission et la période Covid, nous n’avons jamais cessé d’investir avec une moyenne annuelle oscillant entre 8 et 10 % de notre CA. »
Photo : Groupe Thébault

Le 1er juillet vous deviendrez officiellement président du groupe, en succédant à votre père Jean-Charles et vos oncles Benoît et Henri-Jean Thébault. Comment s’est déroulée cette étape importante de l’histoire de votre groupe ?

Durant les quatre dernières années, en préparant la transmission de l’entreprise, nous nous sommes concentrés essentiellement sur l’évolution de notre organisation et de notre organigramme. Passer d’un fonctionnement à trois frères, avec chacun la responsabilité d’une usine et des missions transversales, à un seul représentant de l’actionnariat à terme n’est pas une mince affaire et se doit d’être préparé. Le recrutement de nouveaux cadres – directeurs d’usines, directeur technique, responsable qualité-sécurité-environnement, directeur administratif et financier… – a amené un souffle nouveau. Quadragénaires, ils ont intégré l’équipe en bénéficiant de l’expertise de cadres expérimentés partiellement retraités, ce qui a permis une transition progressive et une transmission sereine.

Votre entreprise se spécialise dans la fabrication de contreplaqué depuis plus de 60 ans et occupe la place de leader sur le marché national. Quelle part de cette production est réalisée à partir des essences françaises ?

Aujourd’hui, la majorité de nos panneaux est fabriquée à partir de ces essences : 90 000 m3 en pin maritime et 15 000 m3 en peuplier. L’okoumé représente 20 000 m3. Nous produisons 125 000 m3 de panneaux par an, soit quasiment la moitié de la production française qui est environ de 260 000 m3. Avec ce volume, nous nous retrouvons également dans le top 5 des fabricants européens.

Le contreplaqué s’adresse aux différents marchés. En termes de volumes, lesquels sont les plus importants pour votre groupe ?

Aujourd’hui, c’est la construction qui est en tête, avec 60 % des ventes. L’emballage industriel représente 20 %, l’ameublement 11 %, les 9 % restants se départagent entre d’autres applications. Chaque année, on investit entre 8 et 10 % en moyenne de notre chiffre d’affaires annuel.

Surélévation en contreplaqué Tebopin. Utilisation structurelle du contreplaqué Tebopin (100 % pin maritime) dans le système constructif BAM (Bâtiment autonome modulaire) élaboré par l’architecte Laurent Piron de l’agence Biotopes. Une solution particulièrement adaptée pour la réalisation de surélévations ou d’extensions en milieu urbain.
Photo : Groupe Thébault

Pourquoi avez-vous décidé d’adhérer au label Bois de France ?

Nos contreplaqués de peuplier et de pin maritime possédaient déjà toutes les certifications requises pour le marché de la construction, de l’agencement ou encore l’ameublement. Les afficher sous le label Bois de France était une suite logique. La demande de produits en bois français ne cesse d’augmenter, nos clients sont très sensibles aux garanties apportées par cette certification qui d’ailleurs correspondent en tous points à celles que nous revendiquons en tant qu’entreprise. Tous nos investissements ont été réalisés en France malgré une rentabilité qui aurait été bien supérieure si nous l’avions fait dans certains pays concurrents. Les crises récentes, les événements géopolitiques du moment prouvent qu’il est essentiel, indispensable et urgent de réindustrialiser notre pays. Investir en France, créer des emplois, les pérenniser, agir pour une économie circulaire et courte sont pour nous les actions qui constituent une mission de vie. Et cela concerne toutes les essences que nous transformons. Nous avons créé un site de déroulage d’okoumé au Gabon en 1999, 11 ans avant l’interdiction d’exportation des grumes par l’État gabonais, pour assurer la pérennité de notre usine de Magné. Nous avons de grands projets pour l’avenir et ils seront réalisés en France. L’objectif est d’utiliser la ressource française, travailler le plus possible en circuits courts pour valoriser les bois de nos forêts.

Le déroulage des essences françaises est réalisé dans trois usines du groupe : à Sauzé-Vaussais (79), à Solférino (40) et à Marigny-le-Châtel (10).
Photo : Groupe Thébault
La salle de sport de l’Espace Tartalin à Aiffres (79), projet : Murail Architectures (44). Les contreplaqués Tebopin Star qui habillent les murs ont été perforés pour assurer une bonne absorption acoustique.
Photo : Groupe Thébault

Comment êtes-vous organisés en ce qui concerne l’approvisionnement en bois ?

Pour le pin maritime, nous nous appuyons sur notre filiale Logifor qui travaille sur toute la façade ouest de la France, une société d’exploitation forestière que nous gérons en partenariat avec la scierie Archimbaud. Nous avons également des fournisseurs de longue date : Alliance Forêts Bois, Smurfit, Unifor Aquitaine, JC Lejeune, Seguin… Pour le peuplier, nous travaillons avec des fournisseurs qui nous ont fait confiance dès le démarrage en 2018 de la nouvelle usine à Marigny-le-Châtel. Nous proposons aussi aux propriétaires de peupleraies un contrat clé en main, en collaboration avec Forêts & Bois de l’Est. En ce qui concerne l’okoumé, il s’agit comme dans le cas du pin maritime de partenariats de très longue date avec les fournisseurs comme Rougier, EGG, CEB et SEEF.

Quels sont vos projets pour l’avenir ?

Le process de transmission a été notre actualité la plus importante durant ces quatre dernières années, mais cela ne nous a pas empêchés d’entamer une série d’investissements. Parmi eux, trois indirects seront importants lors des quatre prochaines années. Il s’agit notamment de l’amélioration de la sécurisation de nos usines, leur relooking pour rendre le cadre de travail plus agréable et moderne, et enfin le sprinklage de tous les sites. Nous investissons continuellement dans le parc machines, ce qui nous a permis d’augmenter notre production ces dernières années. Et cela va continuer : nous comptons atteindre un volume annuel de 200 000 m3 de panneaux d’ici 10 à 12 ans.

Propos recueillis par Anna Ader

Chiffres clés :

  • 85 millions d’euros de CA en 2021
  • 125 000 m3 de capacité de production
  • 70 % de ventes à l’export
  • 380 salariés
  • 5 sites de production
  • 1 société d’exploitation forestière

 

Cet article est extrait de Woodsurfer n°126 > Consulter la version numérique <