Pavillon de l’Iris : le bois s’enracine à La Défense

Avec ses tours en béton et en verre, le quartier d’affaires parisien revendiquait depuis des décennies son attachement à l’architecture minérale. Aujourd’hui, une nouvelle tendance se dessine avec notamment un pavillon en bois accueillant deux restaurants, conçu par l’agence d’architecture Tolila + Gilliland.

Livré au début de cette année, le bâtiment de 400 m2 est installé place de l’Iris, aux pieds de la tour Saint-Gobain. Le projet s’inscrit dans un plan de renouvellement et de modernisation des espaces publics du quartier d’affaires engagé par l’établissement public Paris La Défense. L’ambition de l’aménageur ? Bâtir un quartier d’affaires post-carbone. Pour les 6 000 m2 de la place de l’Iris, le projet paysager comportait une vaste opération de végétalisation. Cet espace, orné déjà depuis les années 1990 par des cerisiers du Japon, compte désormais 51 arbres toutes essences confondues (contre 35 arbres auparavant) et les surfaces plantées représentent au total 1 060 m2. En répondant au concours d’architecture pour la création d’un lieu de restauration dans ce nouveau contexte, les architectes de l’agence Tolila + Gilliland ont décidé de miser sur une forte présence de bois. « Parmi les projets présentés au concours, c’était le seul bâtiment entièrement en bois, rappelle Gaston Tolila. Apparente aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur, la structure bois n’a besoin d’aucun matériau supplémentaire en termes de décoration et c’est aussi là que s’exprime le principe de la frugalité : limiter les dépenses en termes de matière et d’énergie. » Le pavillon n’a pas de fondations. Il s’enroule autour d’un édicule en béton existant : la sortie d’un parking souterrain de 5 niveaux. « Nous avons posé le bâtiment sur un plancher de répartition installé sur les dalles existantes, explique l’architecte. La légèreté du matériau a permis de ne pas apporter trop de charges à l’infrastructure qui est restée inchangée. » Travailler en filière sèche représentait aussi l’avantage d’un chantier avec peu de nuisances sonores. Un critère important pour les occupants des immeubles d’habitation et de bureaux situés à proximité.

Cinq façades

Tout en se démarquant de l’environnement minéral, les façades du pavillon, largement vitrées, reprennent la trame des immeubles de bureaux avec un espacement de 1,5 m entre les poteaux. La protection solaire des vitrages est assurée par des auvents en lattes de mélèze. Inclinés, ceux-là « flottent » à 2,1 m au-dessus
de la base vitrée et créent un garde-corps pour le toit-terrasse partiellement accessible au public par un escalier intérieur en hêtre. La terrasse de 39 m2 offre une vue panoramique sur les immeubles qui entourent le bâtiment. « En dehors de la zone accessible au public, la toiture est traitée avec une végétalisation extensive qui donne un effet de plantation développée, précise l’agence. Un bac potager est également prévu pour permettre la culture des produits pour les restaurants. »

Simplicité et modularité

À l’intérieur, le bois apparent crée une ambiance chaleureuse. « C’est une sorte de jeu de construction, explique Gaston Tolila. On voit les poteaux, les poutres, les caissons du plafond à 3,5 m de hauteur… Tous ces éléments sont structurels. » Légers, les aménagements intérieurs des restaurants mettent en valeur l’architecture du bâtiment. L’indépendance entre l’enveloppe et l’aménagement mis en place permet d’envisager la mutabilité de l’espace et des usages.

 

Un projet bas carbone de A à Z

Construire au milieu d’un quartier d’affaires animé, avec un accès limité (par le sous-sol) et dans un périmètre très réduit représentait un vrai défi logistique. Pour réduire les émissions de CO2 liés au transport, l’agence d’architecture a eu recours au report modal. La structure en bois, préfabriquée dans les ateliers de l’entreprise Poulingue en Normandie, a été acheminée par la voie fluviale, du Havre jusqu’au port de Gennevilliers. Là, une plate-forme de stockage a permis d’organiser un approvisionnement du chantier en flux tendu à l’aide de camions de petit gabarit. « Grâce au report modal, seulement 606 kg de CO2 ont été émis, soit trois fois moins qu’une logistique 100 % routière, précise Gaston Tolila. […] La structure bois a permis de réduire de 42 % les émissions de CO2 par rapport à un ouvrage qui serait réalisé en béton. » Certes, une hirondelle ne fait pas le printemps, mais deux autres projets de construction en bois – immeubles de logements et de bureaux – sont déjà en cours à Puteaux et à Nanterre. Et Pierre-Yves Guice, directeur de Paris La Défense, invité par Fibois France au lancement du Prix national de la construction bois qui a eu lieu le 30 juin au Pavillon de l’Iris, n’a pas tari d’éloges à l’égard de cette réalisation, « un bâtiment qui nous a donné entière satisfaction tant et si bien qu’on va faire en sorte de reproduire l’expérience ». Affaire à suivre…

Anna Ader

  • Maîtrise d’ouvrage : Paris La Défense (92)
  • Maîtrise d’œuvre : Tolila + Gilliland Architectes (75)
  • Entreprise : Poulingue (27)
  • Volume de bois mis en œuvre :
  • 113 m3 : charpente et ossature
  • 27 m3 : bardage

Cet article est extrait de Wood Surfer n°127 > Découvrir le numéro en intégralité <