Terrasses bois : une offre multilame

Espace de vie supplémentaire et synonyme de confort, la terrasse bois fait partie des investissements préférés des Français. La multitude de solutions présentes sur le marché rend le choix difficile, mais c’est la durabilité et bon rapport qualité /prix qui semblent aujourd’hui être ses principaux critères. Chaque famille de produits y répond à sa façon.

Après la mise en vigueur en 2013 du RBUE, une meilleure disponibilité de bois exotiques certifiés a permis à ces derniers de récupérer des parts de marché. Photo : Terrasse Nature

Sur un marché touché par la crise, la terrasse bois apparaissait depuis quelques années comme un des rares secteurs en constante progression. Le bilan 2016 est-il aussi positif ? Les réponses ne sont pas unanimes.  « On frôle une croissance à deux chiffres en ce qui concerne les ventes de terrasses en bois et en bois composite », affirme Charles Lacassagne, chef de marché bois/panneaux chez Gedimat. Pour sa part,  Thierry Pichot, directeur d’activité Bois & Dérivés de Samse, se montre moins optimiste : « Les ventes ont stagné en volume, par rapport à 2015. En plus, il a fallu faire de gros efforts pour arriver aux mêmes résultats. À la fin de 2014 et au début de 2015, une hausse de prix de bois exotiques, due à la parité euro-real, nous a contraints à compresser les marges afin de nous retrouver au plus près des prix de marché. Hélas, ces taux de marge sont restés constants en 2016.» Olivier Kaufman, dirigeant de la société Terrasse Nature et président de l’association Terrasses bois, estime, quant à lui, que  les volumes de ventes sont relativement stables. « C’est un marché assez dynamique, explique-t-il. Beaucoup de gens veulent avoir une terrasse parce que c’est un espace de vie qui agrémente le jardin ou le balcon. Ce sont des ouvrages de plaisir dans lesquels les clients investissent de l’argent et qui sont bien utiles. Quant aux parts de marché,  le bois exotique représente environ 15 %, les résineux presque 50 % et le reste est partagé entre le bois composite et le bambou. »

Selon les responsables de négoces, les clients recherchent des produits durables, avec le meilleur ratio qualité/prix,  et la chasse aux lames à « prix sacrifiés » n’est pas d’actualité. « Si l’argument d’achat n’est qu’un argument prix, l’acte d’achat ne se fait pas dans un réseau comme le nôtre, mais chez un discounter, dit Charles Lacassagne. Nous offrons à nos clients des solutions dont la qualité est garantie dans le temps, à un prix de marché : le bon rapport qualité/prix. »

Grâce à l’aboutage, les lames en pin maritime accèdent au rang de solutions haut de gamme. Photo : Gascogne Bois

Les bois tropicaux jouent la transparence

La popularité des essences exotiques ne se dément pas malgré de régulières flambées des prix et nombreuses campagnes de promotion pour des bois d’origine européenne. L’ipé et le cumaru, suivis par le merbau et l’itauba, sont le plus souvent cités par les responsables de négoces. « Les consommateurs choisissent le bois exotique à partir du moment où l’on justifie d’une qualité régulière de séchage pour en assurer une bonne stabilité mécanique et de couleur uniforme, estime Charles Lacassagne. Aujourd’hui, tous les produits sont assujettis au Règlement Bois de l’Union Européenne. C’est un facteur rassurant qui a permis aux essences tropicales de récupérer des parts de marché. » Chez Samse, où les essences exotiques représentent la majeure partie de l’offre terrasse, la question de la provenance de bois est également prise très au sérieux. « Nous avons au sein du groupe un importateur qui vérifie minutieusement les garanties de nos fournisseurs en matière d’écocertification, confirme Thierry Pichot. L’engouement pour les essences exotiques est bien réel, mais les clients sont aujourd’hui très attentifs à la traçabilité de ces produits. »

De son côté, l’association Le Commerce du Bois, qui avait été nommée en 2015 organisme de contrôle par la Commission européenne dans le cadre de la lutte contre les importations illégales, a décidé l’année dernière d’accroître les exigences environnementales auprès de ses membres. Ainsi, LCB  rend désormais obligatoires pour ses importateurs un audit de charte environnementale, une attestation de conformité au RBUE et la possession d’une chaîne de contrôle. Auparavant, seule la charte environnementale figurait parmi les procédures requises. « Notre objectif est d’avoir 40 importateurs certifiés d’ici 2 ans, déclarait en 2016 Pierre Gautron, président de LCB. Nous avons également conçu un processus de RBUE adapté pour les agents et des négoces. »

Obtenue par différentes techniques, la teinte grise continue de séduire les prescripteurs par son esthétique contemporaine. Ici, les lames de Douglas colorées par imprégnation. Photo : Piveteau Bois

Les résineux en quête d’excellence

Les essences résineuses, le plus représentées sur le marché de la terrasse, offrent un énorme choix en termes de profils, traitements et finitions. Les platelages en pin maritime, considérés pendant des années comme des « produits du terroir » » à aspect rustique, montent en gamme avec des lames aboutées, sans nœuds, offrant une esthétique irréprochable. Côté finition, l’utilisation des saturateurs se fait de plus en plus fréquente et la couleur grise est plébiscitée pour son aspect contemporain.

Les fabricants mettent également l’accent sur l’aspect sécuritaire, en ce qui concerne notamment le risque de glissance. Ainsi, en 2017, Piveteau Bois continue à développer ses profils lisses et bombés en pin et en Douglas, à la fois en imprégnation grise que sur le hors aubier. « Entre la terrasse rainurée et celle à aspect lisse, le marché est en train de basculer vers cette seconde solution, plus moderne et plus esthétique, offrant également des performances intéressantes par rapport à la glissance et à la durabilité des produits, constate Séverine Barone, responsable  pôle aménagements extérieurs de l’entreprise vendéenne. Les rainures permettent aux salissures et à l’humidité de s’incruster dans les lames lorsque la terrasse n’est pas correctement entretenue. Plutôt qu’antidérapantes, elles favorisent alors le risque de glissance. Au contraire, les lames bombées ont l’avantage de laisser l’eau s’écouler. »

Des systèmes modulaires permettent de simplifier et d’accélérer la pose de terrasses. Photo : Mocopinus

Chez Norsilk et Mocopinus, l’innovation concerne non seulement les lames de terrasse mais aussi des systèmes de pose. Norklik de Norsilk est un dispositif clipsable composé de modules en pin autoclave et permettant à une équipe de deux personnes de réaliser 30 m2 de terrasse en une heure. Le système Pinutex de Mocopinus met en œuvre des lames en mélèze de Sibérie sous forme de modules de grand format (10 profilés de 2 ou 4 m de longueur) dont l’assemblage se fait à l’aide de râteaux.

Le traitement par haute température, permettant de valoriser des essences feuillues en emploi extérieur, des professionnels de la terrasse. Photo : Thermory

Les feuillus : promus mais pas reconnus

Frêne, chêne, châtaignier, robinier… Les essences feuillues essaient depuis quelques années de s’octroyer une place dans l’aménagement extérieur, grâce notamment au thermotraitement. Une piste  privilégiée pour valoriser les bois de la forêt française, à coup d’études scientifiques et de campagnes de communication. Si le discours officiel de la filière fait des essences feuillues les futures stars des terrasses à la française et rencontre un certain succès auprès d’architectes, sur le terrain, les négociants ne sont pas toujours prêts à adhérer à cette mouvance.  Chez Gedex (Gedimat-Gedibois), l’offre terrasse est constituée principalement de bois résineux, tropicaux et composites.  « Nous avons très peu de demandes de feuillus tempérés, explique Charles Lacassagne, chef de marché bois/panneaux du groupement. Seuls les produits transformés – comme les bois thermotraités – entrent en jeu, mais comme ils ne disposent d’aucune garantie, il faut rester prudent. Aujourd’hui, nous proposons les essences feuillues surtout dans les agences du réseau Gedibois, spécialisé dans l’offre bois et s’adressant à des professionnels avertis. » Chez Samse, le constat est similaire. « Ce sont les bois exotiques et souvent résineux en provenance des pays du Nord qui constituent l’essentiel de nos ventes, dit Thierry Pichot. Les feuillus français ne représentent qu’une part infime. En terrasse, le bois est fortement sollicité du point de vue mécanique et particulièrement exposé aux intempéries, or ces essences n’apportent pas de garanties suffisantes en matière de durabilité à l’état naturel.  Le thermotraitement peut s’avérer une réponse à ce problème, mais les produits ainsi transformés sont assez fragiles, notamment à la pose.  »

De plus en plus répandues en terrasse, les finitions saturées nourrissent le bois et facilitent son entretien. Photo : Durieu

Du côté des professionnels, on retrouve les mêmes appréhensions et il faut rappeler que ce sont eux qui sont les principaux conseillers des clients. « Les feuillus français, comme le chêne ou châtaignier, sont des essences magnifiques à l’intérieur, particulièrement adaptées pour un certain nombre d’applications, en revanche, en terrasse, ils doivent être utilisés avec un peu plus de précautions, constate Olivier Kaufman. A l’extérieur, aussi bien le chêne que le châtaignier sont sujets à des variations dimensionnelles importantes, fissurent, noircissent, se déforment et sont plutôt sur une classe d’emploi 3 que 4, ce qui présage des problèmes de durabilité. Le thermotraitement a posé des problèmes par le passé, et même si les industriels trouvent une bonne recette pour ce procédé, les bois ainsi transformés gagneront une petite part de marché ; ce ne sera jamais un raz-de-marée au détriment par exemple du pin traité ou de bois exotique. »

Recouvertes d’une protection en polymère, certaines lames composites sont proposées avec une garantie de 25 ans contre la décoloration et les taches. Photo : Fiberdeck

Les composites : promesses de durabilité

L’offre de lames à base de bois composite est extrêmement large et très hétéroclite. De nombreux litiges survenus dans le passé ont démontré la présence sur le marché de solutions peu fiables ce qui, selon les responsables de négoce, a fait baisser des volumes de ventes de cette famille de produits en 2016.  Quels critères permettent de faire le bon choix ? « Un fournisseur sérieux apporte sur ses produits une garantie d’au moins 10 ans, idéalement plus, affirme Olivier Kaufman. Un retour d’expérience positif de plusieurs années est également un bon indicateur à prendre en compte. Sur le marché, il existe une demi-douzaine de distributeurs très connus dont les produits ne causent aucun problème. »

La co-extrusion est citée parmi les procédés qui semblent aujourd’hui les plus prometteurs dans la conception de lames composites. Les produits obtenus par cette technique offrent jusqu’à 25 ans de garantie,  exploit inatteignable pour les lames en bois massif avec des traitements de préservation traditionnels… Côté esthétique, comme pour les terrasses bois classiques, les nuances de gris semblent obtenir de plus en plus de suffrages, pour mettre l’accent sur le caractère contemporain de réalisations. Abandonnant la volonté d’imiter à tout prix le bois, le composite se recentre sur ses arguments de base :  quasi-absence d’entretien et durabilité.

La terrasse en bois composite offre des décors très diversifiés, imitant ou non le bois naturel. Photo : Timbertech

Accoya s’offre une place de choix en terrasse

Parmi les solutions alternatives aux essences exotiques et aux composites, le bois Accoya renforce aujourd’hui sa position grâce à l’obtention de son dossier technique sur l’application en platelage réalisé par le FCBA. Une série de tests drastiques – essais de résistance mécanique, de stabilité en milieu extrême, durabilité, résistance à l’arrachement et de glissance – a en effet permis de constater que les lames en bois acétylé Accoya répondent aux exigences du DTU 51.4. Le document, délivré en décembre dernier, valide également trois systèmes de fixation  – traditionnel par vissage traversant, et deux par clip invisibles : Hardwood Clip et Clip JuAn. « Cette évaluation est un vrai sésame pour développer les ventes de terrasses en France, principalement dans le domaine public : aménagement des berges, pontons…, se réjouit Mathieu Blanc, responsable commercial Accoya pour la France, l’Italie, l’Espagne et la Grèce au sein du groupe Solvay. Elle apporte une crédibilité et assurabilité au produit. Il y a un réel engouement pour le bois massif dans l’aménagement paysager en général, mais les attentes en termes de stabilité dimensionnelle et durabilité sont également très fortes et c’est là qu’Accoya, classe 1 en durabilité naturelle, classe 4 d’emploi,  apporte une vraie réponse avec 25 ans de garantie au contact avec le sol ou dans la terre. Le fait que le procédé par acétylation agisse au niveau moléculaire et soit exempt de produits de préservation ou de biocides est une cerise sur le gâteau ! »

Depuis le mois de décembre dernier, le bois Accoya dispose du dossier technique FCBA pour l’application en platelage. Sa synthèse est disponible sur le site accoya.com. Photo : Accoya

Selon notre interlocuteur, bien que le bois massif Accoya soit présent depuis plus de 10 ans sur le marché européen et mondial, son développement en France est arrivé bien plus tard car les prescripteurs – réglementation aidant – sont parfois réfractaires à l’innovation. L’attestation de FCBA et les performances inédites du bois Accoya, devrait cependant ouvrir davantage de possibilités dans le domaine public en France. « Accoya n’est certes pas encore connu comme l’ipé ou le teck, mais nous travaillons déjà sur de beaux projets ! », conclut Mathieu Blanc.

Anna Ader