Construction décarbonée : le pari gascon

Capable de fabriquer les éléments en bois lamellé-collé et les ossatures bois qu’elle met en œuvre sur ses chantiers, l’entreprise Lamécol prône les valeurs du circuit court. Son pari ? Démontrer tous les talents constructifs du pin maritime des Landes de Gascogne.

Halle couverte, Le Haillan (33). Livré en 2022, cet équipement de 453 m² met en œuvre une structure en lamellé-collé de pin maritime, supportée par des poteaux métalliques tubulaires ronds encastrés en pied, avec descentes pluviales intégrées.
Projet : Bulle Architectes (33).
Photo : Florence Vesval

Créée en 1974 à Mérignac, Lamécol était à l’origine une entreprise familiale spécialisée dans la fabrication de bois lamellé-collé. Avec le temps, son savoir-faire s’est élargi à d’autres domaines. Entrée en 2010 dans le groupe DL (Deyris Lafourcade) comme sa filiale construction bois, Lamécol intervient sur l’ensemble du Grand Ouest.

Lorsque son atelier se lance dans la fabrication de façades et ossatures bois, l’entreprise s’installe en 2013 dans les nouveaux locaux à Canéjan. Depuis 2015, elle est dirigée par Laurent Daudigny, arrivé en Gironde avec une solide expérience acquise pendant plus de vingt ans au sein du groupe Mathis, spécialisé dans la conception, la fabrication et la construction de grands bâtiments en bois à base de charpentes en bois lamellé-collé, d’ossatures bois et de panneaux massifs.

Laurent Daudigny, directeur général de Lamécol : « Aujourd’hui, 80 % de notre lamellé-collé est en pin maritime, en 2024, nous allons passer à 95 %. »
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Polyvalente, l’entreprise réalise dans son atelier de 6 000 m² la totalité des éléments qu’elle pose sur ses chantiers.
Photo : Lamécol

Tracer son chemin

« En 2015, l’entreprise comptait 32 employés, réalisait 5,6 millions d’euros de chiffre d’affaires et intervenait sur un marché qui était en détresse, se souvient Laurent Daudigny. En France, il y avait une surcapacité de production de plus de 30 %. Depuis, la situation a bien changé. La construction bois est en pleine effervescence, Lamécol emploie 65 personnes et notre chiffre d’affaires 2023 est de 15 millions d’euros. » Entourée par des forêts de pin maritime, l’entreprise multiplie des initiatives permettant le développement de l’utilisation de cette essence dans la construction. En 2019, elle crée Épinlam, un lamellé-collé constitué d’un mélange d’épicéa et de pin maritime. La solution obtient la certification « CTB Composants et systèmes bois » de l’Institut technologique FCBA. « C’est un produit très apprécié par les architectes, d’une part parce qu’il s’agit d’essences locales, et d’autre part pour son esthétique particulière résultant d’une superposition de lamelles de couleurs différentes, explique Laurent Daudigny. Nous avons déjà réalisé trois chantiers avec ce système. »

Lamécol coordonne actuellement le programme ProPinLam, retenu dans le cadre de l’appel à projets « Soutien à l’innovation dans la construction matériaux bois, biosourcés et géosourcés » de l’Ademe. Mené notamment en partenariat avec FCBA, Gascogne, Alliance Forêts Bois et I2M Bordeaux, ce programme a pour objectif « de caractériser le pin maritime pour ses performances mécaniques élevées et ainsi valoriser cette ressource locale adaptée au réchauffement climatique ». Une action qui tient à cœur au directeur de Lamécol : « Nous nous sommes aperçus que le pin maritime avait, grâce à sa densité, des propriétés mécaniques meilleures que celles qui pour l’instant sont officiellement annoncées. Nous avons adapté nos méthodes de travail à cette essence. Il y a encore quelques années, il était impossible de fabriquer du lamellé-collé 100 % pin maritime parce que la profession n’était pas suffisamment organisée dans la région. Il fallait donc le mixer avec de l’épicéa. Avec les scieurs locaux, nous avons mis en place des procédures qui d’une part permettent d’obtenir des lamelles de très bonne qualité et d’autre part d’utiliser les déchets. »

Épinlam, le lamellé-collé constitué d’épicéa et de pin maritime. Ce système breveté offre la possibilité de réaliser des poutres de 30 m de longueur.
Photo : Lamécol

Circuit court, polyvalence, industrialisation

En adhérant en 2023 au label « Bois de France », le constructeur souhaitait mettre en valeur sa démarche de travailler avec la ressource locale : le pin maritime utilisé pour la fabrication de son bois lamellé-collé provient des forêts situées à moins de 100 km de l’usine. L’entreprise travaille notamment avec les scieries Gascogne, Lesbats, Labadie et Guédon. « Aujourd’hui, 80 % de notre lamellé-collé est en pin maritime ; pour le reste, nous utilisons du Douglas et de l’épicéa français. En 2024, nous allons passer à 95 % de lamellé-collé en pin maritime. »

Le constructeur est en mesure de produire dans son atelier la quasi-totalité des éléments dont il a besoin sur ses chantiers, exception faite du CLT qu’il achète chez un autre fabricant labellisé « Bois de France » la scierie Piveteaubois. Répondant régulièrement à des appels d’offres pour des opérations de grande envergure, Lamécol dispose d’un bureau d’études composé de 14 personnes. « C’est l’un des plus importants BET chez les lamellistes français, précise notre interlocuteur. Nous travaillons sur Cadwork et, récemment, pour optimiser les lancements en fabrication, nous avons créé un bureau des méthodes. »

Au fil du temps, afin de répondre aux besoins grandissants de l’entreprise, l’atelier de 6 000 m², qui ne disposait au départ que d’un centre d’usinage 5 axes vieillissant, a agrandi son parc machines avec deux nouveaux centres d’usinage (Uniteam CK et Uniteam RC / Biesse), une raboteuse performante (Kälin – Industry 4-310 RS) et un équipement de traitement des bois conçu et réalisé en interne (Catlam).

Le constructeur, qui se spécialise depuis quelques années dans la technique bois-paille, a également investi dans une botteleuse lui permettant de reconditionner les ballots à dimension correspondant au format des murs ossature bois. Actuellement, il travaille avec Mach Diffusion pour organiser de façon spécifique sa ligne de production de murs ossature bois.

Le sens de la fête

Prochain investissement ? L’agrandissement de l’atelier. « Nous allons construire d’ici 2025 une extension de 1 500 m2, annonce Laurent Daudigny. Aujourd’hui, les flux sont bien rentabilisés et nous sommes un peu à l’étroit dans le bâtiment actuel disposé tout en longueur. L’idée est de scinder les deux activités en mettant d’un côté la fabrication du bois lamellé-collé et de l’autre l’ossature bois. Le volume de la production augmente, il faut donc plus de place pour la préparation et pour le stockage. » Un projet qui arrive au bon moment aussi pour une autre raison : cette année, l’entreprise Lamécol fête son 50e anniversaire !  

Anna Ader

Lamécol en chiffres :

65 salariés dont 25 à la production et 14 au BET 4 équipes de pose en interne (une dizaine de personnes)

Volumes de production :

  • 4 000 m³ de lamellé-collé
  • 12 000 m² d’ossature bois
  • 15 000 m² de vêture

CA 2023 : 15 millions d’euros

Cet article est extrait du numéro 135 du magazine WoodSurfer disponible sur Calameo.