Photo : Frédéric Delangle

Chantier de A à Z : Immeuble Pulse, Saint-Denis (93)

Parti architectural

Nouvelle icône de la place du Front-Populaire à Saint-Denis (93), l’opération Pulse d’Icade a été conçue par l’agence d’architecture parisienne BFV. Cette aventure au long cours a été livrée fin 2019.

Plan du R + 2. Doc : BFV Architectes
Coupe transversale. Doc : BFV Architectes

Depuis 30 ans, les villes de Saint-Denis et d’Aubervilliers ont vu leur tissu urbain muter. Les grandes opérations transforment les anciennes usines en immeubles de bureaux, en logements, redessinant des quartiers entiers entre les grandes infrastructures de transport qui lacèrent la Seine-Saint-Denis. Ainsi, en 1995, est créée la Zac Nozal-Chaudron, à cheval sur ces deux communes. En charge de sa réalisation, Plaine Commune Développement l’étend en 2010 et crée la place du Front-Populaire. Autour de celle-ci, métro (ligne 12), bureaux, école, espacespublics (à terme, 10 hectares) et logements fleurissent depuis. L’année 2019 a vu les livraisons de la tour résidentielle Emblématik de Nexity et du programme tertiaire Pulse d’Icade. Les 29 450 m2 de bureaux de ce dernier reçoivent entre autres, pour quatre ans et demi, le comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024. Cet imposant parallélépipède de huit niveaux se situe rue Proudhon. Il fait face au square et ferme la partie sud-ouest de la place du Front-Populaire. En rappel du passé du quartier, les architectes proposent une réinterprétation des monuments industriels qui se dressaient ici naguère. Afin de casser la massivité du programme, la façade est découpée, accidentée et favorise ainsi l’aménagement de terrasses accessibles. Creusé en son centre, le bâtiment cercle un immense atrium de 1 300 m2. Couvert d’une verrière, ce vide permet de créer des façades pour les bureaux au cœur du site. Le sol, laissé libre, pendant privé de la place toute proche, offre au restaurant d’entreprise un espace de choix et la possibilité d’organiser des évènements exceptionnels de grande envergure. En façade, la trame très resserrée de 1,35 m d’entraxe de la structure n’est recoupée horizontalement qu’à chaque niveau, créant un effet de grille. Sa vêture, constituée de panneaux mixtes bois et aluminium anodisé, vibre en suivant les alternances de teintes de bronze à champagne.

Une atmosphère de travail chaleureuse

L’édifice prend appui sur deux niveaux de parking en béton armé. En superstructure, des noyaux béton de 6 m de largeur abritent les circulations verticales, les locaux techniques et les sanitaires. Ils ceinturent la construction en son centre sur les huit niveaux et servent de file intermédiaire pour supporter les planchers bois en CLT et poutres BL-C. De 6 m de longueur, ils portent ainsi jusqu’aux façades (rue et atrium) sans points intermédiaires. Les bureaux, quant à eux, profitent des ouvertures et des vues sur la plaine Saint-Denis et l’atrium. Les plateaux de 4 000 m2 sont divisibles en deux, formant 2 L. En intérieur, la position de la structure bois en façade et ses files très resserrées donnent un jeu de vide et de plein qui rythme les locaux. Ces plateaux libres peuvent être recoupés à volonté. Ainsi, les poutres en BL-C, bien visibles, disposent, en partie inférieure, de rainures qui accueilleront les cloisons de l’aménagement à venir. Visible en tout point, la structure de bois laissé apparent dans sa verticalité et en plafond confère de la chaleur aux lieux.

Un atrium de 1300 m2. Photo : Frédéric Delangle
Une façade rythmée par les ouvertures… Photo : Frédéric Delangle
Pulse fait face à la place du Front-Populaire. Photo : Frédéric Delangle
et des bureaux ouverts sur le paysage. Photo : Frédéric Delangle

Un bâtiment écoconçu

Cette réalisation, « bardée de diplômes », dispose d’une multitude de dispositifs qui améliorent son efficience énergétique. L’atrium, par exemple, joue un rôle essentiel dans la régulation thermique des bureaux. Il permet une circulation d’air traversante et d’évacuer les calories via des ouvrants en toiture. À proximité, des panneaux solaires produisent l’eau chaude sanitaire, tandis que des cuves de récupération des eaux pluviales alimentent les bacs des potagers situés en terrasse. Le bilan carbone du bâtiment profite des 6 000 m3 de bois stockant 3 700 m3 de CO2 et contribuant à la labellisation BBCA (Bâtiment Bas Carbone) de celui-ci. Le recyclage et le recours à l’économie circulaire font également partie des objectifs de l’opération. Épaulé en AMO par Bellastock, des gisements de matériaux ont été identifiés. Cela se concrétise par le recours à un isolant de coton recyclé à hauteur de 85 % et la réutilisation de dalles de plancher technique et de mains courantes issues des opérations de déconstruction environnantes.

                        Intervenants

                 

                          Programme

  • Maîtrise d’ouvrage : Icade Tertial
  • Surface : 29 450 m2 SDP
  • Labels : HQE Excellent, Breeam Excellent, BBCA Excellent, labels E+C- et E2C1

                     

                       Calendrier

  • Projet : 2009
  • Reprise de la conception en 2016
  • Première poutre : 23 octobre 2017
  • Livraison : fin 2019

                       

Études et conception

Photo : Frédéric Delangle

Précurseur au moment du concours en 2009, l’immeuble Pulse et sa structure bois de grande hauteur ont demandé un long travail pédagogique pour permettre sa réalisation. « Le bois n’était pas une évidence, il y a dix ans, concernant les immeubles de plus de trois étages, explique Nicolas Barthes, gérant du bureau d’études en charge de la conception de la structure bois. Il a donc fallu convaincre le bureau de contrôle et rassurer le maître d’ouvrage. Le déclic s’est fait lors d’une visite, à Dornbirn, en Autriche, de l’immeuble LifeCycle Tower One de l’architecte Hermann Kaufmann. Ce bâtiment tertiaire de huit étages a une structure hybride en bois et béton qui lui permet d’atteindre une hauteur de 27 mètres. » C’est ce principe qui a été retenu pour Pulse. Celui-ci est composé de trois anneaux concentriques de 6 m de largeur. L’anneau intermédiaire entièrement en béton confère sa stabilité à l’ouvrage en servant d’appui à la structure bois qui l’enveloppe. Les niveaux de la construction sont formés de panneaux structuraux en bois contrecollé-croisé (CLT), nervurés, utilisés en mur et plancher. Ce système constructif global, Dalbois Azurtec, conçu par la société Mathis, a obtenu son Avis technique en partie grâce à ce chantier. Les planchers sont constitués de nervures ou solives en BL-C 24/32 sur la

partie supérieure desquelles sont fixés, à l’aide d’une colle à base de résine polyuréthane monocomposant, les panneaux de CLT de 140 mm d’épaisseur. Ces derniers jouent le rôle de table de compression, tandis que les nervures travaillent en traction. Cette section recomposée permet de franchir de grandes portées sans point intermédiaire, et cela dans les immeubles jusqu’à 15 étages. Fixés au noyau béton au cœur de la construction via les nez de dalle en CLT, les planchers profitent des poteaux BL-C 24/32 à la trame très resserrée de 1,35 m en façade.

 

Étudiée en avant-projet par les ingénieurs lorrains de Barthes, la structure bois a été finalisée par Mathis en phase d’exécution.

Axonométrie de la charpente bois. Doc : Barthes
Détail sur les terrasses. Doc : Barthes

Réalisation

L’entreprise alsacienne Mathis a eu la charge du lot structure bois. Elle fait partie du groupement dont l’entreprise Bateg est mandataire.

 

 

 

De la joie et de la bonne humeur ! Architecte, bureaux d’études et. entreprises ont apprécié l’étonnante bienveillance qui régnait en réunion. La longue période de préparation du chantier et la préfabrication de la structure ont permis d’éviter les mauvaises surprises et de maîtriser coûts et délais. Ce dernier n’est pas plus court que celui d’une construction tout en béton du fait de la taille du noyau central. Les délais de coulage de celui-ci ont rythmé le travail du charpentier, contenant son élan. Les éléments de la structure ont été préfabriqués dans les ateliers de Mathis. La grande cour intérieure a servi de lieu de stockage des pièces en attente de leur pose à l’aide de la grue à tour.

 

 

 

Omniprésent à l’intérieur du bâtiment, le bois a été sélectionné avec soin grâce à l’expertise du fournisseur, le groupe ISB, qui, par l’intermédiaire de sa marque Silverwood, a livré près de 58 km de tasseaux. Les bois, de haute qualité, proviennent de Scandinavie pour le sapin du Nord et de la côte ouest des États-Unis pour le Yellow Pine. Ces tasseaux ont été transformés sur le site de Nantes pour optimiser les coupes, puis ignifugés. Après leur assemblage par l’entreprise Treuil, les panneaux en sapin du Nord habillent l’atrium, tandis que ceux en Yellow Pine sont mis en œuvre en habillage décoratif dans les circulations très exigeantes en finition. Cette essence américaine, « sourcée » par ISB, est nette de nœuds et présente en effet un veinage aux reflets mordorés. Également utilisable en extérieur, le Yellow Pine, proposé depuis trois saisons chez Silverwood, est d’ailleurs vu, aujourd’hui, comme une alternative au bois exotique.

 

En chiffres

4 800 m3 de bois de structure
17 000 m2 de planchers bois
ISB : 58 km de tasseaux dont 27 km de sapins du Nord et 31 km de Yellow Pine
Montant du macrolot bois : 7,7 M€ HT (lot Mathis dans le groupement Bateg) 

Logistique et délais

Matériel de levage utilisé sur le chantier : grue à tour fixe
Démarrage chantier : 2017
Durée du chantier : 24 mois

Entreprise

Direction : Franck Mathis
Date de création : 1809
Effectif : 160 personnes

Le cahier a été réalisé par Bastien Lechevalier, architecte DPLG

Cet article est extrait du magazine 118 de WoodSurfer >Découvrez le magazine 118<