La Ferme du Rail, Paris (75)
La Ferme du Rail réalisée par les architectes de Grand Huit est un centre d’Hébergement et de réinsertion sociale de 15 logements et une résidence sociale étudiants de 5 logements, une exploitation agricole : des ateliers et une serre de production, une champignonnière et des espaces extérieurs cultivés, en permaculture, en aquaponie, en sac de culture et en agroforesterie et un futur restaurant.

La Ferme du Rail, Paris (75)

Parti architectural

La Ferme du Rail, située dans le 19e arrondissement parisien, a été lauréate de l’appel à projets urbains innovants « Réinventer Paris » lancé en 2015 sur le site Ourcq-Jaurès entre autres.

Le jardin en permaculture

Julia Turpin, Marine Kerboua et Clara Simay sont les coopératrices associées de Grand Huit. Cette coopérative rassemble architectes, paysagistes et acteurs de la recherche urbaine pour créer des lieux de vie innovants, respectueux de la nature et des hommes, où s’inventent d’autres façons d’habiter. Fortement ancré dans les territoires, chaque projet est vu comme une opportunité de promouvoir des modèles de développement durable (du point de vue environnemental, économique et social). Le terrain de 1 300 m2 retenu par la Ville pour le concours « Réinventer Paris » se situe au 2 bis rue de l’Ourcq. Il est branché sur la Petite Ceinture (voie ferroviaire qui faisait le tour de la capitale), à mi-chemin entre le canal de l’Ourcq et les Buttes-Chaumont, dans le quartier Ourcq-Jaurès. Ce positionnement exprimera tout son potentiel après l’aménagement en coulée verte de l’ancienne voie ferrée. La ferme est, en effet, en cœur d’îlot et accessible uniquement depuis un couloir sous voûte qui permet de passer sous la Petite Ceinture.

Sur les toits

Origine du projet et destination

La Ferme du Rail est née d’un désir commun des habitants et d’associations du 19 e arrondissement de voir grandir un lieu qui allie agriculture urbaine et solidarité. Le projet vise l’insertion de personnes précarisées. Il s’intègre au tissu social du quartier et génère une activité de service et de production agricole, créatrice d’emplois. Il s’agit ainsi d’un lieu de rencontre autour de l’agriculture urbaine, d’hébergement, d’espace de formation et de production. Il s’articule autour d’une communauté de personnes en insertion et d’étudiants en horticulture à l’École du Breuil et développe des activités maraîchères en circuit court qui valorisent les déchets organiques de la ville. Le programme est hébergé dans deux bâtiment distincts organisés autour d’un jardin en permaculture orienté plein sud.

Les bâtiments

Le premier comprend un hébergement qui accueille cinq étudiants en architecture et horticulture, et quinze personnes en insertion. En R + 3, le bâtiment à ossature bois et ses logements sont desservis par l’intérieur, et par l’extérieur via des coursives situées sur la façade ouest, terrasse idéale pour les fins de journées ensoleillées. Le deuxième accueille une grande serre verticale dédiée à la production de légumes hors sol. À structure bois elle aussi, des ateliers. Socle sur lequel est posé le restaurant accessible aux publics et alimenté par la production du site. Au-delà de la structure des bâtiments, le recours aux matériaux biosourcés et de réemploi a été systématique. En vêture, des demi-rondins de châtaignier, essence utilisée pour son imputrescibilité, posés à la verticale habillent les deux bâtiments. L’isolation acoustique a été obtenue par l’installation de textile recyclé Métisse entre les solives des planchers, et par de la fibre de bois dans les chapes sèches des logements. Des panneaux de façade remplis de paille fournie par un agriculteur d’Île-de-France assurent l’isolation thermique.

Gestion thermique de la serre (été/hiver)
Doc : Grand Huit

Un véritable écosystème

Le passage sous la Petite Ceinture ouvre sur une véritable oasis. Ici, la moindre surface disponible est optimisée à des fins de production. On y trouve un jardin en permaculture et un verger d’agroforesterie. Les toits des logements et des ateliers accueillent un potager en bacs, tandis qu’en façade, des treilles supportent une végétation grimpante. L’eau est aussi très présente, et son chemin sur la parcelle bien étudié. Une fois captée en toiture, elle est filtrée par un bassin de plantes aquatiques, puis stockée dans une cuve enterrée en vue d’irriguer les potagers au moment opportun. Un bassin est également consacré à la pisciculture. Les déchets végétaux, quant à eux, sont compostés et mis à profit sur place par les jardiniers. En complément, un local enterré et donc à température constante, dans une voûte de la Petite Ceinture, est réservé à la valorisation des déchets organiques produits par le quartier, toujours à destination des jardiniers.

Intervenants

Maîtrise d’ouvrage : Réhabail
Architecte : Grand Huit
Paysagiste : Mélanie Drevet
BE TCE : Julien Virgili, Scoping
BET paille et étanchéité à l’air : Frédéric Cousin
Agroécologue urbain : Philippe Peiger
BE thermique : Pouget Consultants
OPC/AMO : Albert & Compagnie

Programme

Surface : 1 000 m2 SDP
Coût des travaux : 3,5 M€ HT

Calendrier

Lauréat de « Réinventer Paris » : 2016
Livraison : fin 2019

Études et conception

Photo : My Muratet

Le bureau d’études bois limougeaud Hemery a accompagné en phase d’exécution l’entreprise Vaninetti dans la réalisation de la charpente bois de La Ferme du Rail.

Les superstructures des deux bâtiments sont en charpente bois. Posées sur une assise en béton armé, elles sont constituées de MOB et de poteaux et poutres en BL-C assemblés à l’aide de ferrures en âme et de broches. Le bâtiment de logements comprend un premier MOB 45/240 placé du côté extérieur. Celui-ci est doublé d’un deuxième MOB 45/120 vissé au premier du côté intérieur, offrant ainsi une profondeur suffisante pour y placer les bottes de paille de format standard (360 mm) qui isolent la construction. Les planchers intérieurs constitués de solives BM 75/225 prennent appui sur ce dernier via une lisse en BL-C et profitent du MOB extérieur pour être isolés en tête, limitant ainsi les déperditions thermiques. En intérieur, la portée des solives des planchers est recoupée grâce à des MOB porteurs 45/95. La toiture plate, support de l’un des potagers en bacs, est réalisée à l’aide de caissons BL-C de 360 mm de hauteur. En façade ouest, les planchers des coursives en Lignadal (prédalle en bois) sont portés par une ossature à poteaux-poutres en BL-C raccordés à la façade en MOB. Le bâtiment de la serre, quant à lui, est formé d’une succession de portiques en BL-C.

Disposés tous les deux mètres, ils comprennent des poteaux et des poutres 200 x 560 pour une portée de 11 m, dégageant ainsi un plateau libre de tout point porteur et destiné à la production de légumes. La cage en béton du monte-charge apporte un point de contreventement à l’ouvrage.

Double MOB pour accueillir les bottes de pailles Photo : Grand Huit
Jonction MOB/plancher Doc : Hemery
Charpente de la serre Doc : Hemery

Réalisation

Photo : My Muratet

Vaninetti, qui a intégré le groupe Rubner en 2019, a eu la charge du lot bois. Cette entreprise de construction implantée à Rosny-sur-Seine intervient sur les chantiers franciliens depuis 34 ans.

Un espace restreint Photo : My Muratet
MOB posés Photo : Grand Huit
L’accès au chantier Photo : My Muratet
                                           Garnissage des panneaux Photo : Grand Huit

Dialogue, recherche de synergies nouvelles et dimension sociale sont les fondements du projet de La Ferme du Rail. Le chantier lui-même se devait donc de réunir ces conditions. Ainsi, le pilotage de ce dernier par Albert & Compagnie a été réalisé suivant la méthode LEAN (méthode de gestion de la production qui se concentre sur la gestion sans gaspillage, ou allégée ou encore au plus juste). Celle-ci favorise les échanges entre les entreprises et la compréhension des interactions entre les intervenants du chantier. Il s’agit d’une approche didactique et pédagogique. Exprimant la dimension sociale du programme, le recours à des entreprises qui emploient des personnes en réinsertion a été privilégié. Par exemple, le remplissage des panneaux MOB en bottes de paille de blé provenant de Rambouillet a été réalisé par l’APIJ, entreprise d’écoconstruction tous corps d’état et d’insertion. La position particulière de la parcelle a demandé un peu d’ingéniosité pour approvisionner le chantier : une piste pour camion a été aménagée sur une voie de la Petite Ceinture permettant d’accéder au site depuis la rue de Thionville. Les MOB préfabriqués dans les ateliers de Vaninetti ont ensuite été gruté à leur emplacement définitif. En toiture, les panneaux ont été mis en place avec leur isolant posé au préalable en atelier. En effet, pour la pérennité de la paille, celle-ci doit être parfaitement sèche au moment de refermer les murs.

Le cahier a été réalisé par Bastien Lechevalier, architecte DPLG

Origines des bois

Solivage traditionnel en épicéa du Grand-Est
Charpente BL-C en épicéa d’Europe du Nord
MOB en épicéa du Grand-Est
Bardage en châtaignier de Bretagne

Matériels et délais

Matériel de levage utilisé sur le chantier : Manitou, nacelle
Démarrage chantier : mars 2018
Livraison : décembre 2019

Entreprise
Direction : Bruno Burnouf
Date de création : 1987

 

Cet article est extrait du magazine WoodSurfer N°121 >Découvrez le magazine<