Économie circulaire : le bâtiment s’adapte

L’un des plus grands consommateurs de ressources et d’énergie, le secteur du bâtiment est aujourd’hui face à plusieurs défis. Les nouvelles manières de construire préconisées par la réglementation doivent être basées sur les principes de l’écoconception, de la consommation responsable des ressources, de l’allongement de la durée d’usage et du recyclage. Tout un programme.

Assemblage de plusieurs lamelles de bois sous forme de couches successives fortement compressées, puis encollées à l’aide de liants, les panneaux OSB trouvent différents usages dans la construction et dans l’agencement.
Photo : Swiss Krono

L’ère du modèle économique traditionnel et linéaire, qui repose sur le principe du « prendre-fabriquer-consommer-jeter », est désormais révolue. La construction change de régime et s’adapte à l’économie circulaire. Partager, réutiliser, réparer, rénover et recycler les produits et matériaux existants devient la norme et il faut dire que les industriels ont fait d’énormes progrès dans ce domaine. Dans la filière bois, le procédé est bien présent depuis des années. Le principe « rien ne se perd, tout se transforme » est appliqué notamment pour la fabrication de différents types de panneaux OSB, aggloméré… à partir de particules de bois ou de copeaux liés par une résine synthétique.

Les nouvelles laines de verre contiennent entre 50 et 80 % de verre recyclé.
Photo : Isover

Isolation : recyclage en marche

Les panneaux isolants en fibre de bois sont obtenus quant à eux par le défibrage des résineux issus des rémanents de forêts et de scieries. Il s’agit de matériaux dépourvus de colle, car la résine contenue naturellement dans le bois sert de colmatage des fibres. Le secteur de l’isolation est d’ailleurs particulièrement ouvert aux solutions à base de matériaux recyclés. La laine de coton, par exemple, est composée à 80 % de coton industriel recyclé. On observe la même tendance dans le secteur d’isolants traditionnels. Chez Isover, les produits de la gamme Isoconfort sont fabriqués à partir de verre recyclé (en moyenne 50 % et jusqu’à 80 %) et d’un liant 100 % biosourcé issu de l’industrie céréalière et sucrière. Rockwool, spécialiste de l’isolation en laine de roche, affirme que ses produits peuvent contenir jusqu’à 75 % de matériaux recyclés.

Utilisant la technologie Wood Powder, les sols en bois densifié constituent une alternative aux parquets massifs.
Photo : Meisterwerke

Recyclage en boucle fermée : une alternative prometteuse

En France et en Europe, les déchets de bois de la construction sont généralement recyclés dans un système en boucle ouverte où ils sont broyés avant de subir une valorisation finale. Cette méthode dégrade forcément les caractéristiques du matériau initial et limite ses applications ultérieures, surtout pour les déchets de bois massif qui ont peu de possibilités de revalorisation en nouveaux produits. Le recyclage en boucle fermée, c’est-à-dire la réinjection des bois en début de chaîne, pourrait constituer une alternative intéressante et industriellement viable pour les acteurs de la deuxième transformation du bois.

Cette hypothèse est à l’origine du projet ReCoWood qui réunit cinq entreprises et le laboratoire de recherche de l’ESB. Il s’agit d’une extension des travaux réalisés auparavant dans le cadre du projet européen CareWood, mené par FCBA et l’ESB. Leur objectif était de démontrer la faisabilité d’utiliser et de recycler les bois faiblement adjuvantés provenant principalement des déchèteries dans la fabrication de produits en bois lamellé-collé.

Dans ses conclusions, le projet européen confirmait que ces bois étaient réutilisables, mais que leur recyclabilité nécessitait un important travail de manipulation, faute d’utiliser des outils industriels non connectés. Le projet ReCoWood, toujours en cours, propose un démonstrateur technologique connecté. « Ce démonstrateur permettra ensuite le développement d’une ligne de transformation complète des résidus de bois en carrelets de bois lamellé-collé de manière industrielle, en intégrant des machines, des capteurs d’automatisation et des procédés », annonce l’ESB.

OrganicBoard Pure P2, panneau de particules fabriqué avec des bois recyclés et une colle biosourcée.
Photo : Lameo
Les bois composites, recyclables et réemployables.
Photo : Pfleiderer

Évaluer la circularité

En avril 2023, le CSTB a lancé Ecoscale, outil d’évaluation de la circularité des produits et équipements de la construction axé sur quatre indicateurs couvrant l’ensemble du cycle de vie : matières recyclées et renouvelables (évaluation de la quantité de matières recyclées et/ou renouvelables dans le produit), démontabilité, réemployabilité et recyclabilité.

Les produits sont notés de A à E. En consultant cette base de données, on constate rapidement, et sans surprise, que les produits bois obtiennent une excellente évaluation au niveau du premier et du deuxième critère, en revanche, leur réemployabilité et leur recyclabilité ne sont pas systématiquement bien notées (C, D ou même E, en ce qui concerne les bardages en stratifié HPL).

Seules les lames de bardage en bois composite (WPC) s’illustrent dans ces deux catégories en obtenant même des notes B. Étonnant ? Pas vraiment. Dans la réemployabilité, sont pris en compte, en dehors de l’indicateur de la démontabilité du produit, d’autres paramètres : l’existence d’un guide méthodologique d’évaluation des performances en vue d’un réemploi, les conditions de stockage, les difficultés de reconditionnement…

Pour ce qui est de la recyclabilité, on évalue la séparabilité des composants, la présence de substances pouvant faire obstacle au recyclage… Bref, plusieurs conditions doivent être remplies et les matériaux biosourcés et renouvelables ne disposent pas forcément de passe-droit dans ces domaines.

Anna Ader

Cet article est extrait du numéro 135 du magazine WoodSurfer disponible sur Calameo.