Innover avec le bois local

Installée à Provenchères-et-Colroy dans le Massif vosgien, la société Sertelet est spécialisée dans la charpente bois et les maisons ossature bois. Avec plus de 40 ans d’expérience, cette entreprise familiale relève aujourd’hui tous les défis, y compris ceux des projets complexes et expérimentaux.

 La Halle de Tendon (88), projet lauréat du Prix national de la construction bois 2017. Conçue par l’Atelier d’architecture Haha, la structure a été réalisée par l’entreprise Sertelet.
Photo : Atelier d’architecture Haha

Si la couverture était la première activité de l’entreprise, créée en 1982 par Yves Sertelet, le père de l’actuel dirigeant, la charpente bois s’est imposée rapidement et logiquement. D’abord en rénovation, puis dans le neuf avec l’élargissement de compétences aux maisons ossature bois.

« Aujourd’hui, nous construisons toujours beaucoup de maisons individuelles, mais intervenons également sur des chantiers plus importants, en répondant aux appels d’offres sur le marché privé et public », précise Guillaume Sertelet, président de la société. L’entreprise dispose d’un bureau d’études, d’un grand atelier de fabrication et également d’une équipe de pose – tous les éléments sont donc réunis pour s’attaquer aux projets architecturaux les plus audacieux. Et ceux-là ne manquent pas, plusieurs ayant même été primés lors de différents concours, régionaux ou nationaux : centre périscolaire de Tendon dans les Vosges (Prix national construction bois 2012), résidence Jules-Ferry à Saint-Dié-des-Vosges (PNCB 2015), Halle de Tendon (PNCB 2017), collège Elsa-Triolet à Thaon-les-Vosges (Prix régional construction bois Grand-Est 2020), maison de santé à Liffol-le-Grand (PNCB 2022)…

Quant à l’approvisionnement, le constructeur a toujours privilégié les bois locaux : épicéa, sapin, Douglas, chêne, hêtre… Depuis cet été, la société est labellisée « Bois de France », le choix que son dirigeant qualifie de naturel et logique : « Nos clients – maîtres d’ouvrage privés ou publics, communautés de communes…  demandent expressément l’utilisation du bois local, c’est donc aussi une démarche commerciale de notre part. Nous travaillons souvent avec les architectes de la région. »

Envie de voir grand

L’entreprise emploie une cinquantaine de personnes, dont six au bureau d’études intégré, vingt à l’atelier et autant en pose. Le constructeur possède ses propres camions et grues. Le développement de l’activité numérique a commencé en 2005 avec l’achat de la première K2 de Hundegger (aujourd’hui il y en a deux). C’est aussi à cette époque que la société a quitté ses locaux de 300 m2 à Ban-de-Laveline pour s’installer dans un bâtiment de 1 500 m2 à Provenchères-et-Colroy. Depuis, celui-ci a été agrandi de 1 000 m2 en 2016, puis de 1 500 m2 en 2021. « On va être obligés de l’agrandir encore pour installer de nouvelles machines, constate notre interlocuteur. L’investissement sera fait probablement d’ici trois ans. »

 Disposant d’outils de production performants, l’atelier de l’entreprise est capable de répondre aux besoins de chantiers d’envergure. Ici, la partie ossature bois.
Photo : Sertelet Charpentes et Construction Bois

Kaïdobôh : construction « couleur locale »

Les projets de ce troisième agrandissement sont liés en grande partie au développement de la nouvelle activité depuis 2022 : la fabrication de murs en bois massif chevillé. « Les murs se composent de planches d’épicéa provenant de forêts locales, des Vosges et d’Alsace, explique le fabricant. Elles sont disposées à plat, empilées selon des orientations différentes et assemblées entre elles à l’aide de chevilles en bois de hêtre. Ce processus technique permet de réaliser des murs sans colle ni produits chimiques et, qui plus est, voués à rester apparents pour un intérieur en bois sain. »

Cette technologie innovante Twoods a été conçue en 2005 en Suisse. La société Sertelet, qui est la première à l’importer en France, l’a nommée Kaïdobôh, ce qui signifie « morceau de bois » en patois vosgien. Une démarche marketing astucieuse pour souligner que tous les bois utilisés dans la fabrication de murs chevillés sont locaux. « En général, on préfère travailler avec du bois massif parce qu’il s’agit de notre fabrication et c’est plus écologique, insiste Guillaume Sertelet.

De plus, pour la fabrication de ces murs, il est possible d’utiliser des bois scolytés, surtout en partie invisible, et cela n’a aucun impact sur la solidité des éléments. On fabrique également dans nos ateliers des chevilles en hêtre qui servent à assembler les planches entre elles. » Les parois sont réalisées en cinq épaisseurs (150, 170, 180, 210, 240 mm) et peuvent être combinées au choix, mais aussi montées sous forme de panneaux muraux doubles.

Atelier Kaïdobôh. Utilisant la même technologie que les murs, les planchers en bois massif peuvent être fabriqués avec une épaisseur allant de 120 à 280 mm en fonction de la portée.
Photo : Sertelet Charpentes et Construction Bois
Assemblés à l’aide de chevilles en hêtre, les murs en bois massif Kaïdobôh sont destinés principalement au marché des maisons individuelles.
Photo : Sertelet Charpentes et Construction Bois

Process industriel pour procédé 100 % bois La technologie Kaïdobôh repose sur une préfabrication très poussée grâce à la ligne de production spécifique (Twoods-Line) de Technowood. De 60 m de longueur, celle-ci est équipée de trois portiques successifs à commande numérique qui correspondent aux trois phases de fabrication : assemblage, chevillage et usinage. Cette dernière opération permet d’obtenir un élément avec une surface plane, une épaisseur conforme à l’exigence et tous les usinages et découpes nécessaires. La société utilise la même technologie pour la fabrication d’un plancher en bois massif. Celui-ci est constitué de bois bruts ajustés les uns contre les autres, positionnés à chant, le tout assemblé par des chevilles en hêtre. Il peut être utilisé en tant que plancher entre niveaux ou toiture de tous types (2 pans, toiture-terrasse).

« Aujourd’hui, nous fabriquons autant de maisons individuelles que des éléments ossature bois, précise Guillaume Sertelet. L’atelier est organisé de façon à pouvoir accueillir ces deux activités en parallèle. Sur la partie Kaïdobôh, nous ciblons plus particulièrement le marché de la maison individuelle, mais on a fait également beaucoup de planchers pour des réalisations de taille plus conséquente. » Avec le futur agrandissement de l’atelier de production, cette nouvelle technologie devrait s’offrir une place encore plus importante sur les chantiers du Grand-Est.  

Anna Ader

Entreprise Sertelet en chiffres :

Création : 1982
50 salariés
Surface atelier : 4 000 m2
Parc machines : 2 centres d’usinage K2 (Hundegger), 1 ligne de production Twoods-Line (Technowood), 1 table papillon Weinmann, 4 tables d’assemblage ossature bois
Volume de bois transformé : 5 000 m3 par an
Chiffre d’affaires 2023 : 7 268 917 €

Cet article est extrait du magazine WoodSurfer 134 disponible sur Calameo.